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08/11/2018 – Francis EUSTACHE

jeudi 8 novembre 2018, par Guillaume VALLET

Les aléas des mémoires individuelles et collectives : le programme de recherche 13-Novembre

Date : 08 novembre 2018
Heure : 11h30 - 12h00
Lieu : Amphithéâtre Paul Collomp

Résumé de la conférence

La mémoire autobiographique est un concept fréquemment utilisé en neuropsychologie et plus largement en neurosciences. Son évaluation est orientée vers la dimension personnelle et subjective, mais des travaux récents insistent sur les interactions constantes avec la mémoire collective. La compréhension de ces liens est importante sur le plan théorique et ouvre des perspectives cliniques nouvelles. L’exemple du programme de recherche longitudinal 13-Novembre sera développé. Ses diverses études ont pour objectif de comprendre la construction des mémoires individuelles et collectives à partir d’un événement traumatique : les attentats du 13 novembre 2015 survenus à Paris et dans sa proche banlieue. Nous décrirons la mise en place de ce programme transdisciplinaire dans un contexte particulier, les premières analyses, les premiers résultats. En clinique, l’exploration de la cohérence entre la mémoire individuelle et la mémoire collective est particulièrement pertinente dans le trouble de stress post-traumatique en permettant une meilleure compréhension des facteurs de risque et de résilience. Au-delà, la lecture de la construction conjointe, discordante ou non, de différentes strates de mémoire individuelle et collective, pourrait trouver des applications dans des situations qui placent l’individu dans une rupture existentielle. Par exemple, les troubles de la mémoire sont décrits dans le cancer du sein, et cela avant même la mise en place des traitements pharmacologiques. Ces troubles de la mémoire peuvent être compris comme résultant d’un bouleversement psychosociologique lié à un changement de statut entraînant une discordance entre mémoire individuelle et mémoire collective (les « cadres sociaux » de Maurice Halbwachs). Ce contexte théorique ouvre également des pistes de réflexion pour la prise en charge des patients, notamment la façon dont l’entourage - les soignants, les aidants, mais aussi le cadre social plus large - doit s’adapter à la trajectoire existentielle certes modifiée mais en construction permanente d’un patient singulier. Cette approche peut aussi trouver des développements pertinents chez des patients qui souffrent d’une pathologie de la mémoire (syndrome amnésique, maladie d’Alzheimer, …). Les patients vont, ou non, ressentir un décalage entre leur vécu au quotidien (par exemple le fait de vivre dans un hôpital) et la mémoire de leur environnement antérieur auquel ils restent attachés, ce décalage pouvant porter sur plusieurs décennies. Là encore, les distorsions de la mémoire autobiographique entre la mémoire vécue au jour le jour et son « cadre social » constituent un terrain de compréhension des troubles de la mémoire.

Conférencier

Pr. Francis EUSTACHE
Directeur d’études à l’École pratique des hautes études (EPHE), directeur de l’Unité de recherche U1077 Inserm, EPHE, Université de Caen Normandie. Neuropsychologue de formation et spécialiste de la mémoire humaine et de ses maladies, il dirige l’Unité de recherche « Neuropsychologie et imagerie de la mémoire humaine » depuis le début des années 2000.
[Site internet]

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